samedi 7 janvier 2012

Quelle(s) stratégie(s) faut-il adopter pour assurer la sécurité microbiologique des aliments et de celle des acteurs (sociétés, industries, environnement, etc.) ?

 
Auteurs: GANKPE F, DIALLO N, KONE K, OUEDRAOGO O, SANWOGOU D.
Sous la direction du Pr Etienne DAKO, Microbiologiste Alimentaire, Université de Moncton

Introduction
La question de la sécurité des aliments est devenue depuis quelques décennies un problème de santé publique. Les dangers microbiologiques d’origine alimentaire constituent aujourd’hui une préoccupation majeure en santé, et deviennent de plus en plus fréquents du fait de l’apparition des nouvelles technologies dans l’agriculture, l’élevage, la pêche, le changement de nos habitudes alimentaires, la mondialisation etc. [1].
Les toxi-infections alimentaires du fait de leur caractère accidentel suscitent de vaste mouvement de panique pour les gouvernements, les professionnels, et les consommateurs [2].  Les stratégies pour assurer la sécurité microbiologique des aliments ont pour but de donner des orientations concernant l'établissement et l'application de critères microbiologiques pour les aliments à tous les stades de la chaîne alimentaire, depuis la production primaire jusqu'à la consommation finale [3], « de la ferme au plat ».
Nous proposons dans le présent travail après quelques définitions de concept, les stratégies adaptables à chaque pays qui permettront d’assurer une maîtrise des risques microbiologiques d’origine alimentaire.
1.     Définition des concepts
Sécurité alimentaire : c’est une situation qui garantit à tout moment à une population, l'accès à une nourriture à la fois sur le plan qualitatif et quantitatif. Elle doit être suffisante pour assurer une vie saine et active, compte tenu des habitudes alimentaires. Elle doit garantir  d'innocuité des produits alimentaires, c'est-à-dire que leur consommation n'aura pas de conséquences néfastes sur la santé [3].
Sécurité des aliments : la sécurité des aliments est l’assurance que les aliments ne causeront pas de dommage au consommateur quand ils sont préparés et/ou consommés conformément à l’usage auquel ils sont destinés [3].
Risques microbiologiques : c’est l’exposition aux dangers microbiologiques dans les aliments autrement dit le danger que présente un aliment pour être contaminé. Ils constituent tous les dangers auxquels on peut raisonnablement s’attendre à tous les stades de la production, de la transformation et de la distribution jusqu’à la consommation [4].
2.      Stratégies
2.1. Au niveau des organisations internationales, intergouvernementales [5].
Le rôle des organisations intergouvernementales comme la FAO et OMS est de :
- appuyer   l’élaboration et le  choix des stratégies nationales adaptées à chaque pays ;
- appuyer la région à mettre en place des stratégies régionales de sécurité des aliments ;
- faire respecter les normes et standards de sécurité des produits alimentaires qui circulent  au niveau du commerce international
2.2.            Au niveau des pays [6] 
Les gouvernements ont un rôle capital à jouer. Trois types de système sont possibles : système à organismes multiples, système à organisme unique et système intégré. Le choix de l’un ou l’autre système traduit la volonté des gouvernements, le caractère prioritaire qu’ils accordent aux initiatives en matière de sécurité sanitaire des aliments. Cependant les actions à mener doivent couvrir les éléments suivants:
Ø  évaluation du risque
-          mise en place d’une législation «de la ferme à la table » ;
-          élaboration des documents et des guides, par exemple, bonnes pratiques agricoles, bonnes pratiques de fabrication, bonnes pratiques en matière d'hygiène (HACCP)
-          adoption ou adaptation des normes Codex et textes apparentés à la situation nationale;
Ø  gestion du risque
-          création d’une autorité de sécurité sanitaire des aliments;
-          établissement des mesures de maîtrise indiquant les exigences pertinentes et les paramètres appropriés aux étapes spécifiques de la filière alimentaire ;
-          fixation des exigences pour les procédures d'inspection et de vérification, de certification ou d'homologation et des certificats d’importation pour certains produits;
Ø  information, éducation et communication
-          promotion des programmes de sensibilisation, d’enseignement et de formation pour la prévention de la contamination et/ou l’introduction de risques.
-          sensibilisation sur l’existence des procédures pour le rappel rapide d’aliments y compris des procédures de traçabilité/suivi de produits et d’étiquetage approprié
Les autorités publiques chargées de la réglementation sont responsables non seulement de la vérification du bon fonctionnement du système alimentaire, en menant à bien des activités de contrôle et de surveillance, mais aussi du respect des exigences légales et réglementaires.
2.3.            Au niveau des industries
Exploitants  agricoles et éleveurs [7]
Au niveau de la production primaire les stratégies à  mettre en place pour réduire les risques microbiologiques doivent consister à   :
- assister les agriculteurs  par des scientifiques et des services de conseils qui leur fournissent des informations sur la meilleure utilisation des pesticides.
 - respecter   les règles d'hygiène dans les bâtiments d'élevage et durant l'abattage pour  limiter l'infestation des  animaux par des micro-organismes
Industries agro- alimentaires [5, 8, 9].
L’industrie constitue un maillon essentiel sur la voie de  la sécurité microbiologique des aliments.  Pour assurer la sécurité des produits les industriels doivent   :
-          fixer des paramètres qui permettront d'atteindre les objectifs de sécurité alimentaire et  de contribuer à leur réalisation;
-          utiliser les systèmes de contrôle qualité pour assurer la sécurité des produits qu’ils fabriquent : le Guide de Bonnes Pratiques (GBP), l’analyse des dangers et des points critiques de contrôle (HACCP pour Hazard Analysis Critical Control Points), les standards d’assurance-qualité de l’International Standards Organisation (ISO 9000) ;
-          appliquer, s’il y a lieu, des plans d’échantillonnage pour les analyses microbiologiques;
-          élaborer des plans pour les mesures correctives incluant des procédures de retrait/rappel ;
-          communiquer efficacement avec les fournisseurs, les clients et/ou les consommateurs
-          former le personnel sur les mesures d’hygiène et assurer la communication interne ;
-          intégrer de façon optimale les différentes démarches de prévention, destruction, inhibition, élimination et compétition des micro-organismes dans les matières premières et dans les produits de transformation, au niveau du matériel et de l’environnement de la production ;
-          protéger les aliments au travers de l’emballage.
 Ces systèmes de contrôle-qualité employés dans l’industrie alimentaire impliquent aussi que les fournisseurs, les transporteurs, les grossistes et les détaillants atteignent le même niveau de qualité.
2.4.            Au niveau des consommateurs [7, 8, 9]
Toutes les méthodes utilisées pour garantir la sécurité des aliments ont un seul aboutissement : la sécurité du consommateur. Si l’état et les industries jouent un rôle important, il revient cependant au consommateur une part non négligeable des activités à menées. Il faut vérifier la date limite de consommation sur l’emballage, assurer un transport rapide des produits destinés au réfrigérateur ou au congélateur, vérifier la qualité des produits de conserve, assurer un stockage et une conservation adéquats des aliments, éviter tout contact entre le cru et le cuit, etc.
La préparation des aliments doit respecter les règles d’hygiène élémentaires : le lavage des mains et des aliments (fruits et légumes), la propreté des lieux et des ustensiles de cuisine, faire refroidir les aliments cuits aussi vite que possible et ensuite les réfrigérer ou congeler. Cela ralentit la croissance bactérienne, qui se manifeste entre 4 et 60°C (la zone de danger), réchauffer suffisamment les aliments cuits pour tuer toutes les bactéries qui ont pu se développer au cours du stockage, suivre les instructions du fabricant.
Le consommateur doit s’informer afin de respecter les mesures d’hygiène. Les associations de consommateurs peuvent jouer un rôle appréciable dans la diffusion de l’information au public.
Conclusion
La sécurité  microbiologique des aliments ne peut être assurée que si la responsabilité est partagée par tous les acteurs de la chaîne alimentaire, de l’Etat aux consommateurs en passant par les industries agroalimentaires. Tout au long de la chaîne alimentaire, de nombreux procédures et mécanismes de contrôle sont indispensables pour garantir l’innocuité de l’aliment qui vient à la table du consommateur. 
L’application des stratégies adaptées pour la sécurité microbiologique des aliments peut rencontrer plusieurs obstacles, dans le contexte spécifique des pays sous développés notamment de l’Afrique [10] : -le manque de volonté politique et les problèmes de priorisation des actions de l’Etat - l’insuffisance de laboratoires microbiologiques bien équipés  et de ressources humaines compétentes pour le contrôle des denrées alimentaires - l’insuffisance de textes régissant le domaine de la production et de la commercialisation des produits alimentaires ; et les défaillances dans l’application des textes, liée à la corruption et à l’impunité.
En dépit de ces obstacles, l’adaptation des stratégies aux différents contextes nationaux et locaux s’avère indispensable.
L’engagement de l’Etat, la prise de conscience et le changement de comportement de tous les acteurs constituent une condition sine qua none pour l’efficacité d’une stratégie de sécurité microbiologique des aliments.
Références
2.      Rastoin J L « Chapitre 1 - Risques et sûreté alimentaire dans un contexte de mondialisation », in Mediterra 2007, Presses de Sciences Po, 2007, p. 29-71.
3.       www.fao.org/docrep/w6419f/w6419f05.htm consulté le 19/12/2011
4.      FAO/OMS. Evaluation Du Risque Microbiologique Dans Les Aliments, Rapport de la Consultation mixte d’experts FAO/OMS Genève (Suisse) 15-19 mars 1999
5.      Codex alimentarius. Principes et directives pour la gestion des risques microbiologiques, CAC/GL-30, 1999
6.      FAO/OMS. Garantir la sécurité sanitaire et la qualité des aliments : directives pour le renforcement des systèmes nationaux de contrôle alimentaire. FAO/OMS, 2003 : 84p
7.      OMS, "De la Ferme à l'assiette du consommateur-Une responsabilité partagée, 1998 : 32p.
8.      PNA, Programme National Alimentaire, France, 2011
9.      OMS, Programme de Salubrité des aliments  2002 « Stratégie mondiale de l'OMS pour la salubrité des aliments .Une alimentation à moindre risque pour une meilleure santé »  2002 : 32 pages.
10.  Leveau J- Y, Bouix M, Larpent J-P. sécurité microbiologique des procédés alimentaires. Techniques de l’ingénieur. Mars 2001

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